mercredi 10 juillet 2013

Juillet 2013, bilan et expérimentation...

Petit bilan avant les vacances:

- aux Rendez- Vous Singuliers de St Félix, je n'ai pas porté de nez de clown: une femme de ménage zélée puis une mondaine "prout- prout" sont apparues et ont animé le chateau de St Félix. Je n'ai pas eu envie de porter le nez: j'ai assumé ces interventions théâtralisées et j'ai adoré cela!
Le travail amorcé avec des professionels locaux sur le clown vu par la Cie du Moment a changé la donne: le clown n'était pas légitime alors que la comédienne l'était! Ce travail de clown plus exigent et plus "codifié" que celui étudié avec le bataclown m'ouvre des portes majestueuses de recherche mais en ferme évidemment d'autres. Normal! Par ailleurs, j'ai découvert ma réelle capacité à faire exister des personnages au travers d'une manifestation et à les créer en fonction de l'évènement!
La Cie Kaïros va porter ces Gens Urbains créés à volonté selon les manifestations...

- dans le même ordre d'idée, Kaïros- Le Cube va exister en forme déambulatoire. La Dame du Cube vit la même histoire que dans le spectacle d'origine mais les chapitres sont fractionnés avec les déplacements d'un lieu à un autre. Elle chante et danse toujours...

- en parlant Danse! Je vais re-danser, oui! Sur scène et avec des" trucs" car je suis en révolte ! Ma révolte suit évidemment mon ressenti de femme, de danseuse et je sais combien c'est à moi de m'autoriser à danser sans attendre l'assentiment des autres. n'empêche, ça va mieux en le disant et comme Dominique Dupuy l'a très bien écrit , je m'en sers!
A la lecture du charmant livre de Dominique Dupuy, "La sagesse du danseur", j'ai trouvé écrit ce que je savais qui m'a été confirmé:
"Dans certaines occasions, se déclarer danseur devient comme une profession de foi ou l'aveu d'un délit..."

Nous parlons donc comme Dominique Dupuy du merveilleux mot qu'il a inventé et qui me réjouit: le vieillissage...

"A part l'exception d'un chorégraphe de grande notoriété, dont l'oeuvre connait une longévité heureuse, le danseur vieux est un danseur mort, un homme mort à la danse, il n'a plus rien à faire sur la terre de la danse qu'à disparaitre de sa constellation. Comment peut- il décemment annoncer qu'il est danseur? Il était danseur, il a été danseur..."

..."Il n'y a pas de limite d'âge pour ces acteurs, leur art s'est concentré, à la fois enrichi et dépouillé. Enrichis de ce dépouillement, finalement plus riches et plus dépouillés, ils atteignent ce qu'on a coutume, et raison sans doute, de nommer le sommet de leur art.
Atteindre ce sommet- ce haut plateau- est un plaisir rare, intense et délicieux, une qualification à laquelle le danseur, privé qu'il est de danser la vieillesse, n'a pas accès. C'est un malheur pour lui, certes; mais cela l'est aussi pour les autres: pour le public qui n'a jamais le droit de voir un danseur dans le grand âge, privé ainsi d'une part importante et inconnue de la danse. L'image de la jeunesse collée au danseur est si forte, si prégnante, que l'idée même d'un danseur vieux ne vient pas à l'esprit. C'est inconcevable. On ne voit pas ça; on n'a jamais vu ça. Aurait- on envie de le voir: c'est une question qu'on peut se poser mais qui n'a pas de réponse possible puisque cela n'existe pratiquement pas; c'est une exception, un épiphénomène dont on parle comme d'une bête curieuse, comme l'invention d'un fossile d'avant l'histoire, ou l'échouage d'un gigantesque cétacé sur le sable d'une plage bretonne."

A la lecture de ce constat, j'opine du chef et je m'interroge comme souvent: comment danser en vieillissant? en ayant mal partout? Qu'est- ce que la danse quand la prouesse n'est plus de mise, que le corps se dérobe parfois, garant du temps qui passe. Le corps n'empêche pas, il rappelle à l'ordre quand le mental prend les commandes et voudrait se comparer à la jeunesse. Et là encore Dominique, danseur de grand âge explique:

"Pour que celui qui danse puisse intégrer l'âge à sa danse, pour que sa danse puisse absorber l'âge, il faut au premier chef qu'il ne cherche pas à le masquer par des artifices, des béquilles, des faux semblants, des "faire comme si", qu'il ne joue pas les évaporés, la jeunesse à tout prix. Sus à la vieillardise! Puis, qu'il ne répudie pas cette vieillesse comme certains répudient une vieille femme; il faut qu'il ne renie pas l'âge, mais s'en nourrisse dans un accord avec le temps, constamment nouveau, rajeuni. Faire son âge sans tricherie, être de son âge, être son âge.
La recherche de la danse de l'âge est aussi passionnante que l'apprentissage de la danse à ses débuts. Le danseur est ainsi un éternel apprenti. Se mettre en quète du corps propre, celui que l'on sent, qui nous appartient, l'état de corps dans lequel  nous existons au plus profond."

"Pour transformer sa danse, pour la faire voguer de métamorphose en métamorphose, il est nécessaire que l'homme qui danse se prenne en charge, qu'il ne dépende pas de l'autre, celui qui l'a initié et conduit dans l'apprentissage, u celui qui l'a fait entrer dans la carrière. La transformation quotidienne se fait par soi- même, en connaissance de cause. On n'entre plus dans une gestuelle imposée, généralement conçue pour la jeunesse, on suit son désir propre, jusqu'à instaurer une sorte d eprévention salutaire. C'est une liberté que l'on s'accorde à soi- même, garante d'autonomie. On sort de l'enfance pour retrouver sa propre enfance."

S'enseigner à soi- même, c'est au lieu d'enregistrer encore et encore, synthétiser, évaluer et critiquer ce que l'on a appris; c'est abandonner le futile, l'inutile. Cela suppose lucidité et courage. Il s'agit d'éliminer non seulement ce que l'on ne peut plus faire, mais aussi ce que l'on ne veut plus faire; c'est opéré un choix drastique; c'est combiner avec la passion un peu de raison."

et pour clore le chapitre, Expérimentation: un nouveau souffle pour la danse dans la ligne du texte au-dessus en mèlant danse et peinture. Un résultat riche, passionnant et enthousiasmant.

à suivre...